
A l'heure où, du moins pour quelque temps, le soleil semble vouloir s'installer sur le territoire, les diktats des apparences vestimentaires (et physiques ?), l'inconfort lié aux mouvements contraints et le port de chaussures aux bouts serrés et laçages parallèles vont s'éloigner quelques semaines le temps de la coupure estivale.
Encore que, s'habiller pour l'été revêt parfois davantage de difficultés.
Il y a trente ans de cela, j'étais militaire et travaillais auprès d'un chef de corps, un lieutenant-colonel, au sein d'un régiment. Au début du mois d'août, il m'indiqua avec ce temps grave des voix travaillées "...Demain, début du port de la tenue d'été pour les officiers.".
Autrement formulé, nous pouvions porter les bermudas réglementaires - pour s'employer dans des bureaux frais -, privilège que le reste des troupes n'avait pas, devant endurer par là-même, le port du treillis quelle que soit la température.
Le vêtement comme blason.
Le vêtement comme apanage.
Le vêtement comme outil d'influence.
Dans les organisations, les règles et usages autour du fameux code vestimentaire n'ont guère évolué depuis les cent dernières années.
Vous serez, par exemple, toujours plus compétent habillé en vendeur d'aspirateurs des années 50 qu'en tenue décontractée parce que l'été pointe le bout de son nez.
Je sais, vous prônez le contraire.
Pour une fois d'ailleurs, l'inégalité hommes / femmes ne joue pas en la faveur des hommes.
A noter.
Les codes ont la vie dure et ce sont toujours les mêmes arguments qui tournent en boucle :
Image de l’entreprise Nous voulons "...projeter une image professionnelle et cohérente". L'apparence est un jeu d'influence assumé : il biaise considérablement la perception des clients et des partenaires. D'ailleurs, dans un autre contexte, qui n'a pas souri en voyant débarquer Colombo sur une scène de crime ?
Conformité sociale Nous héritons d'une construction sociale et culturelle que nous transmettons à notre tour. S'intégrer dans un groupe, c'est aussi rentrer dans un moule. En ne s'y pliant pas, consciemment ou non, c'est du refus d'allégeance, d'appartenance et/ou de conformité dont nous témoignons.
Validation sociale Le jeu d'alliance est au cœur des interactions humaines. Vouloir être aimé, même si tel n'est pas le but avoué, guide l'imitation vestimentaire. Quand nous pensons choisir nos vêtements pour nous, nous ne faisons que les porter par besoin d'être accepté par les autres. Parfois même, par besoin d'être "validé" par les autres.
Discrimination et stéréotypes Ce flirt entre liberté et injonctions verse souvent vers une forme de discrimination dans les entreprises. "... Pas X chez tel client, elle ne ressemble à rien avec sa coupe de cheveux". La phrase entendue était pire. Exemple vécu. Malheureusement, si l’apparence physique est source de discrimination en entreprise, malgré ce que dit le droit, c'est que nous en sommes toutes et tous les complices.
Sexisme Les "choses" avancent comme cela s'entend parfois. Quelles choses ? Une étude menée par le collectif #StOpE (EY, 22/03/21) a révélé que 82% des salariées interrogées estiment que les femmes sont régulièrement confrontées à des attitudes ou des décisions sexistes dans les monde du travail. Les formes les plus courantes incluent des incivilités en réunions, des remarques dégradantes ou des blagues, ainsi que la remise en cause des compétences professionnelles. Les auteurs de ce sexisme sont bien habillés.
Il est prêté au pape Grégoire IX (XIIIè siècle, source : lalanguefranaise.com ) d'avoir souligné dans une lettre que "... Ce n'est pas l'habit qui fait le moine, mais l'observation des règles et la perfection de sa vie".
Huit siècles plus tard, si l'habit ne fait pas le moine, fait-il le Moi ?
Et sous l'habit, qui n'est finalement qu'un alibi, quand et comment traitons-nous l'arbre qui cache la forêt ?
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