Alors que les jeux olympiques ont créé une bulle d'émerveillement et de lien dont la question de la durée de vie se pose déjà, fleurissent ici ou là des articles sur les parallèles possibles entre le monde du sport et celui des entreprises.
Vieux sujet, vieille réponse : il y en a, peu, mais il y en a avec la professionnalisation progressive du sport. Ce sont cependant des systèmes qui restent encore éloignés.
Il existe naturellement un management du sport comme il existe un management des établissements de santé, des associations, etc. Les populations qui y travaillent sont différentes, les attentes sont différentes et certains codes sont quasi opposés.
L'utilisation de certains verbatims communs n'aident pas à s'y retrouver. Un peu comme la "résilience" cuisinée à toutes les sauces.
Il est une congruence cependant à toute organisation : l'association de personnes, leurs us et coutumes, talents et compétences au sein d'un collectif.
S'il y a de la vertu à cela, un bruit de fond prend plus d'ampleur depuis quelques années : une perception de violence en croissance.
Comme toute contagion facile, les comportements violents franchissent allègrement les périmètres des foyers, des écoles et des stades pour migrer au sein des organisations.
Mimétique, progressive, souvent justifiée à coups d'alibis toujours plus invraisemblables, la violence s'immisce tel un vers dans le fruit et les dégâts internes sont toujours plus dévastateurs que ce que laisse supposer la peau en surface. Elle est souvent contrebalancée par des valeurs bruyamment revendiquées mais sans perception nette dans le quotidien.
Tour d'horizon.
Violence ?
C'est en prenant un dictionnaire que le champ des mots s'ouvre à nous. La violence ou plutôt, les violences, y sont définies dans toutes les acceptions et elles sont multiples.
En résumé, elles peuvent être définies comme tout comportement qui cause un dommage physique ou psychologique à une autre personne. D'un point de vue neurologique, le cerveau de l'enfant par exemple, traite indifféremment une violence physique d'une violence psychologique.
Dans le contexte de l'entreprise, la violence peut se manifester par des comportements tels que l'intimidation, les menaces, les insultes, le harcèlement ou encore la discrimination.
Ces comportements entament la santé des victimes et impactent durablement la non performance globale de l'entreprise.
Personne ne se tape dessus dans les entreprises. Si cela devait arriver, l'issue serait assez rapidement réglée.
Nous naviguons dans les strates inférieures : comportements aux limites de l'acceptable parfois, petites humiliations et blagues qui font mal, rumeurs, etc.
Nous nous régulons ou sommes régulés par les autorités de tutelle quand nous basculons vers le côté obscur de la force collective : tu es des nôtres ou tes jours chez nous sont comptés.
"Si on ne peut plus rien dire maintenant…"
"Quelle époque de pleureuses", dixit un dirigeant vu cette année.
J'ai voulu comprendre ce que cette phrase voulait dire. J'ai donc demandé en quoi nous vivions dans une époque de "pleureuses". Je n'ai obtenu que des métaphores guerrières ou encore sportives.
Il ne fut pas possible d'obtenir des qualificatifs appartenant au champ des organisations ou alors via un lieu commun "management", "exigence", "pilotage", etc.
Rien sur le temps par exemple, sur le tissage de ce qui va permettre de comprendre l'autre ou de comprendre ce qui n'est pas compris ou encore que nous ne nous comprenons pas.
Pourtant cela a toujours existé. Pourquoi la perception d'une violence plus grande se manifeste-t-elle davantage aujourd'hui ?
Pression économique : Les entreprises font face à une concurrence accrue et à des attentes de performance que nous voulons toujours plus élevées. Qui n'a pas râlé car l'objet commandé à 15h aujourd'hui ne sera livré qu'après-demain malgré un abonnement "prime" ?
Changements organisationnels : Les restructurations, les fusions et les acquisitions engendrées pour le permettre provoquent de l’incertitude et de l’instabilité sans phase de stabilité dont nous avons besoin "écologiquement" entre les cycles.
Culture d’entreprise : Certaines entreprises valorisent une forme d'agressivité et de compétitivité excessive pour y arriver. Qui sème le vent, récolte la tempête. Qui sème le stress récolte la violence.
Technologie et surveillance : Tout en prônant le besoin de lâcher prise, nous augmentons le monitoring, le contrôle et la surveillance via de la technologie que nous grefferons bientôt sous la peau. Pour être sûr. Espérons que ce soit dystopique mais en l'état, déjà, nous amplifions les tensions.
Demain dépend de nous
"Demain dépend de nous …/… . Nous avons besoin de quelqu'un qui nous dise faites attention. Prendre la compétition comme moteur est une folie. Toute compétition est un suicide.
…/… Le pire de tout est d'avoir fait des écoles, des lieux de compétition.", Albert Jacquard.
Il serait tentant de penser que les organisations, par leur nature hiérarchique et concurrentielle, sont intrinsèquement violentes.
Cette vision est trop simpliste. Les organisations ne sont pas violentes par essence, mais elles peuvent devenir des lieux de violence si elles ne mettent pas en place des politiques et des pratiques pour prévenir et gérer les comportements violents.
En ne visant qu'un résultat compétitif, le regard ne se tourne que vers une finalité, par vers la méthode pour y parvenir.
Pourquoi les Jeux Olympiques ?
Le 23 juin 1894, les Jeux Olympiques sont rénovés et le Comité International Olympique fondé. Les principes qui guident le Baron Pierre de Coubertin dans cette démarche et qui sont à l’origine de l’olympisme tiennent en quatre points :
Promouvoir le développement des qualités physiques et morales qui sont au fondement du sport,
Éduquer les jeunes par le sport dans un esprit de bonne compréhension mutuelle et d’amitié, dans le but d’aider à construire un monde meilleur et pacifique,
Diffuser les principes olympiques dans le monde entier et créer de la sorte une bonne volonté internationale,
Rassembler les athlètes du monde dans le grand festival sportif quadriennal que sont les Jeux Olympiques.
Il est intéressant de noter que le mot "compétition" n'est pas utilisé. Comme aucun mot qui pourrait laisser percer un quelconque vecteur de violence.
A méditer.
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